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Climathon, semaine 41 : Nicolas Hulot l’emporte une nouvelle fois

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Par Benoît Rittaud.
(et le jury du climathon)

Nicolas Hulot - Crédit photo : Fondation Nicolas Hulot via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0

Nicolas Hulot – Crédit photo : Fondation Nicolas Hulot via Flickr (CC BY-NC-ND 2.0

À moins de deux mois de la fin de la compétition, les concurrents du Climathon se sont rués dans la bataille de la propagande pour tenter de l’emporter. Le contexte difficile d’un public qui semble ne pas vouloir accorder aussi volontiers que prévu son enthousiasme pour le Nouvel Ordre Climatique a obligé les candidats à une surenchère de grand talent.

Comment choisir entre les splendeurs offertes cette semaine ? La première d’entre elles, qui a longtemps tenu la corde, n’est autre que la célèbre sortie de Nathalie-Kosciusko-Morizet qui, n’hésitant pas à faire peuple pour sauver les gens d’eux-mêmes, a déclaré que les climatosceptiques étaient des connards. C’était simple et de bon goût, typiquement le genre d’assaut qui plaît au jury pour son caractère direct et foudroyant. Hélas pour elle, l’ex-ministre au vocabulaire si particulier n’avait pas prévu un effet de bord malheureux : ces odieux climatosceptiques, vexés qu’on leur dise la vérité sur leur compte, ont eu l’outrecuidance de jouer le jeu de la victimisation, comme si les traiter de ce qu’ils sont pouvait être constitutif d’une insulte. L’assaut de Nathalie-Kosciusko-Morizet a donc eu une conséquence des plus fâcheuses : les soutiens au Collectif des climato-réalistes se font de plus en plus nombreux. La tentative, qui semblait si brillante, de l’ancienne ministre doit donc être déclarée caduque.

Le malheur des uns fait le bonheur des autres, et c’est le meilleur compétiteur de tous les temps au Climathon qui l’emporte cette semaine encore : Nicolas Hulot, alias le Commandeur des Croyants, s’impose grâce à son millionième tract débile qui lui donne l’occasion de répéter encore les mêmes fadaises nouvel Appel adressé aux chefs d’États pour sauver l’humanité, la planète et les ours polaires.

Pour les lecteurs qui ne craignent pas de mourir sous le choc de la bêtise la plus insondable faire face aux vérités qui dérangent, une fabuleuse vidéo promotionnelle a été produite pour accompagner l’Appel. (Celui de Nicolas Hulot, donc. Oui, le dernier qu’il a lancé, celui de la semaine dernière. Non, pas celui de cet été. Suivez un peu, quoi.) Destinée plus particulièrement aux jeunes, cette vidéo  prend explicitement ceux-ci pour des abrutis complets tâche de s’adresser à eux sous forme de gestes et d’éructations diverses dans ce que Nicolas Hulot et ses fins ethnologues ont reconstitué comme étant leur mode naturel d’expression.

Intitulé « Chefs d’État, osez », l’Appel intime l’ordre à ceux-ci de « reconnaître que la lutte pour le climat conditionne l’avenir de notre monde », leur enjoint d’en « finir avec les beaux discours et les déclarations d’intention » avant de conclure sur un audacieux « Chefs d’État, soyez à la hauteur. Entrez dans l’Histoire. Osez ! ». Il s’inscrit dans une tradition désormais fort longue d’appels en tous genre dont personne n’a rien à cirer qui chacun à sa manière sème de petites graines dans la société : une coalition, des consciences, des femmes, une louche de société civile, l’Océan en personne, les faucheurs de chaises et même des arbres fruitiers. Après la Warmlist de Brignell, peut-être pourra-t-on bientôt songer à une Appel-list.

Contrepoints829 - Nicolas Hulot - René Le HonzecL’Appel récompensé cette semaine est accompagné de douze indispensables « propositions essentielles pour les décideurs politiques », dont certaines ressassent un dévoiement désormais classique de la science au profit d’un projet politique ; toutes ont un rapport évident avec le combat du Bien contre le Chaos Climatique : « Réguler enfin la finance », ainsi que « mettre fin aux abus des multinationales » (rien de tel que l’élection d’adversaires pour mobiliser les citoyendumondes), « garder sa couleur bleue à la terre » (avec l’irréversible hausse des océans, ça devrait aller ; attention tout de même de ne pas donner l’impression d’un appel du pied à Nadine Morano), « renforcer la justice sociale pour combattre le dérèglement climatique » (le jury se déclare incompétent pour comprendre tout lien de causalité), et encore « réinventer la démocratie » (l’Envoyé spécial du Président remettrait-il en cause la légitimité de son Envoyeur ?)

L’Appel est accompagné d’une petite promotion pour le dernier livre du Commandeur, sobrement intitulé Osons. Cet étrange plagiat d’une réflexion d’un ancien président de France Télévisions il y a plus de vingt ans nous dit ceci :

« Parce que l’urgence est à l’action, Nicolas Hulot dresse, avec sa Fondation, une feuille de route alternative pour les États en 12 propositions concrètes et suggère 10 engagements individuels pour que chacun puise [sic] également faire bouger les lignes à son niveau. Cri du cœur, plaidoyer pour l’action, ultime appel à la mobilisation, le livre « Osons » est également un coup de poing sur la table des négociations climat avant le grand rendez-vous de la COP21. »

Dans l’« Ultime appel à la mobilisation », on aura bien entendu reconnu l’évidence du fait que quand le Commandeur a parlé, les autres n’ont plus qu’à fermer leurs gueules et faire ce qu’on leur dit de faire passer à l’action citoyenne pour le bien de la Nature et de l’Homme. Une stature de Commandeur, c’est une question de force intérieure, qui permet de faire face stoïquement même au narcissisme le plus ridicule.

Les accessits

Belle entrée au Climathon cette semaine du groupe d’éditeurs Belin – Le Pommier – Pour la Science pour leur catalogue « Je m’engage pour le climat » qui regroupe tout ce que ces éditeurs ont publié de tracts livres pour sauver la planète. Avec des citations choisies des meilleurs scientifiques qui savent faire la part des choses, tel Pierre Léna qui explique que

« refuser de faire confiance à ces travaux [ceux qui annoncent l’apocalypse climatique], parier sur l’incertitude, ici mineure, demeurant dans toute prévision, pour prendre un risque aussi majeur seraient preuve d’inhumanité et d’aveuglement. »

Les climatosceptiques sont donc inhumains en plus d’être des connards. Le reste du catalogue est à déguster sans modération, il contient absolument tous les poncifs du genre toutes les vérités incontestables sur l’impact du réchauffement climatique sur la santé, sur les questions énergétiques et sur la sobriété nécessaire. Repentez-vous, mes frères, car vous avez pêché, et la fin du monde est proche.

Les ONG ont souhaité s’assurer par quelques sondages que le temps de cerveau disponible des « consom’acteurs » a bien été pénétré de la nécessité de l’action. Un premier sondage nous apprend ainsi que seulement 25% des Français ont entendu parler de la COP21. Pour se rassurer, les commanditaires du sondage pourront toujours se dire que 86% des sondés se montrent conscients qu’ils devront changer leur mode de vie. Nos modes de vie n’étant déjà plus exactement ce qu’ils étaient il y a 50 ans, l’on ne peut que souscrire à l’avis de cette écrasante majorité. Triomphant, le président du comité 21, commanditaire de l’étude, considère ainsi en un certain raccourci logique que « ce n’est plus la seule affaire de militants engagés, le grand public aussi se sent concerné » et par là-même « qu’il ne jette plus la responsabilité sur les entreprises ». La suite de l’étude aurait pourtant pu quelque peu doucher son optimisme béat car quand il s’agit de passer aux actes, les Français semblent être nettement moins prêts à l’action (10% sont prêts à modifier leurs modes de transport et 22% leur consommation d’énergie par exemple). Mais surtout, c’est l’aspect financier qui semble leur poser problème (pour 48%). Quelle surprise, n’est-ce pas…

Un autre sondage commandité par le WWF indique que si les Français craignent effectivement l’apocalypse qui leur est promis (ouragans, cyclones, augmentation des sécheresses, fonte des glaces…), ils considèrent à 82% que les gouvernements ne répondent pas « sérieusement à l’urgence climatique ». Il semble donc finalement qu’à défaut de rejeter la responsabilité sur les entreprises, la grogne s’oriente vers les gouvernants – voilà au moins un des objectifs poursuivis par les ONG qui semble en passe d’être accompli.

Dans le passionnant match à la surenchère, Les Échos se sont une fois de plus illustrés :

« Les économistes ne se risquent plus à donner des chiffres mais jugent le coût potentiellement infini. »

Encore une belle leçon des économistes aux climatologues, qui jouent « petits bras » pour chiffrer l’augmentation des températures à l’horizon 2100. L’infini, ça a quand même une autre gueule, non ? Il faut dire que chiffrer les prédictions de Jean-Marc Jancovici, un des papes auto-proclamés de l’énergie maître-expert sauveteur de planète, s’avère une tâche ardue, de nature à rebuter les âmes sensibles :

« Imaginez un monde où 30% de l’humanité aurait succombé par maladie d’ici à 2089. Un monde où la moitié du globe serait devenue un désert en 2080. Un monde où le Gulf Stream aurait disparu en 2120. Tous ces événements sont possibles dans le cadre du réchauffement en cours. »

Jean-Marc Jancovici a donc suivi l’injonction du Commandeur des Croyants : il ose. Tout. Bravo.

Un blâme

Des informations concordantes font état d’un désintérêt généralisé du corps enseignant lors de la semaine de simulations de négociations climatiques pourtant exigées par la ministre française de l’Éducation nationale dans sa lettre circulaire de juin dernier. Pour une telle négligence, à l’ensemble desdits enseignants est attribué un blâme collectif. Ce blâme n’atteint pas l’institution elle-même, qui s’est toujours montrée d’une loyauté sans faille à l’alarmisme climatique.


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